Ce document a pour vocation d’introduire sur le site de l’association AAPEL www.aapel.org

La " parole des patients borderline, ex-borderline ou supposés "
que ceux-ci aient été diagnostiqués ou pas

Le but étant d’avoir une vision globale de cette maladie

C’est le décalage entre ces visions qui peut être fort intéressant pour tout le monde
D’autre part répondre à ces questions peut être un plus pour se tourner sur soi-même
Attention si répondre à ce questionnaire est trop douloureux pour vous, laissez tomber
Ne répondez qu’aux questions qui répondent à votre " profil "
Si vous ne voulez pas répondre à une question dites-le plutôt que laisser en blanc (ou mentir)
Dans le cas d’ex patient borderline répondez pour chaque question en terme d’évolution
Les " oui, non " … sont la pour guider, développez si possible
(mettre en Gras ses réponses pour les oui,non)

Votre prénom
Jacqueline.

Votre sexe et age (pour situer)
Je suis une femme de 45 ans.

Etes-vous (selon vous) Borderline ? (que vous soyez diagnostiqué(e) ou pas)

  1. Oui, J’en suis intimement convaincu(e)
  2. Oui, Ca y ressemble bien
  3. Peut-être, mais j’ai encore beaucoup de doutes
  4. Non car je suis guéri(e)
  5. Non, et je ne l’ai jamais été (dans ce cas ce questionnaire pourrait ne pas vous concerner)
  6. Je ne sais pas, pas la moindre idée
Si vous avez répondu " Oui " ou " peut-être ", quel a été le déclic qui fait que notamment vous soyez en train de remplir ce formulaire ?
Après m'être reconnue dans ce qui a été dit sur les Borderline, je veux réfléchir sur mes comportements et difficultés, les mettre davantage en lumière.

Etes-vous diagnostiqué(e) Borderline ?

Diagnostic / Comportement

Qu’est ce qui selon vous ne va pas chez vous ?

  • Ma tolérance est à peu près au niveau 0. Devant des situations que d'autres supportent facilement, moi je rage. Mes colères surprennent tout le monde. Par exemple, je peux devenir complètement perturbée et passer des commentaires cinglants, si je vais à l'épicerie et je trouve que la caissière est lente, si je demande quelque chose au travail et que l'on me fait attendre, si je demande un renseignement à un service public et que je ne suis pas satisfaite de la qualité de ce service, etc. Alors les gens me rabrouent et cela me fait vivre encore une plus grande colère. Je ne suis jamais satisfaite, et je critique beaucoup. Les gens trouvent cela très lourd. Moi je ne comprends pas qu'ils ne souffrent pas comme moi de tout ce qui ne va pas.
  • Toutes mes relations finissent par une rupture. Lorsque je vis une frustration avec quelqu'un, parce que je suis en désaccord avec ce qu'il dit par exemple, je sens que cela provoque une cassure en moi dans ma relation avec l'autre et que c'est irréconciliable, définitif, que le lien ne se refera jamais, que la personne est jugée sans appel. Au travail, après quelque temps je trouve toujours que les gens sont incompétents, spécialement les supérieurs, et que je subis des injustices. Après quelques temps, je deviens en plus "tannée de mon travail", n'y trouvant plus de sens. C'est une sensation très désagréable. Alors je veux que les autres changent, et premièrement les supérieurs. Lorsque monte mon irritation, on peut prédire que je vais perdre mon travail à l'avance, que je vais me choquer contre un supérieur très bientôt. Même si on m'avertit, moi, à partir de ce moment, "je ne vois plus clair", il n'y a plus rien à faire pour arrêter la suite.

  • Je n'ai jamais conservé un emploi plus d'un an, même si je m'investis énormément dans mon travail; auparavant c'était moi qui partait en claquant la porte, maintenant ce sont les gens qui me mettent à la porte, et les cycles sont de plus en plus courts. À mon dernier emploi, j'ai travaillé 5 semaines et on m'a mise à la porte. Ce n'est pas une question de compétences, les gens disent que je suis très compétente, mais que j'ai un problème de personnalité, que je suis incapable de m'adapter, que j'ai des problèmes d'attitudes, de comportements. J'ai toujours cru que j'étais correcte, que ce sont les autres qui ne l'étaient pas. Mais voilà, ma carrière est brisée, je n'ai pas de bonnes références, car les gens relèvent ma compétence, mais également mon problème de personnalité. Je n'ai aucune vie de famille, aucun conjoint, je suis devenue pauvre, l'échec total quoi!
     
     
  • Quand je me fais une amie, quand j'ai un nouveau patron, je trouve que ces personnes sont les plus extraordinaires au monde. Puis il vient toujours un moment où je les vois comme les pires personnes au monde. Alors, c'est la colère et la rupture. Quand je vois quelqu'un en noir, la pression en moi est trop forte, je ne peux tolérer cela, alors j'explose.

  • Il y a deux personnes dans ma vie qui ne m'ont pas rejetée, malgré mes ruptures et mes colères. Ce sont un ami prêtre et une amie handicapée, très chrétienne; il semble qu'il faut vraiment être charitable pour m'endurer! Mais ces deux personnes me font vivre des chose épouvantables; je passe constamment de l'amour à la haine avec elles.

    Les gens me disent que quelquefois je suis la personne la plus gentille du monde, et puis soudainement je les traite comme s'ils étaient les pires personnes au monde, et que je les glace et les écrase. Lorsque je me choque envers quelqu'un, mes paroles sont extrêmement dures. Les gens me disent qu'il y a deux personnes en moi, qu'ils ne savent jamais à quoi s'attendre avec moi.
     
     

  • Je suis extrêmement sensible au rejet, je vois toute petite marque de rejet chez les gens, vis à vis moi ou vis à vis d'autres personnes, alors que ces mêmes gens n'en sont même pas conscients. Si quelqu'un ne me dit pas bonjour, ne me voit pas, ne m'écoute pas assez, n'a pas la même opinion que moi, cela me fait vivre des choses affreuses. J'interprète cela comme du rejet.

  • Je ne suis pas capable de dire de façon appropriée à la personne concernée que je ne suis pas d'accord avec elle. La seule façon d'exprimer mon désaccord est lorsque la pression ne m'est plus tolérable; alors je me choque, je parle très fort. Certains me disent qu'ils ont peur de moi quand je suis en colère, qu'ils n'ont jamais vu quelqu'un de si fâché. Cela me surprend beaucoup, j'ai beaucoup de difficultés à le croire, car il me semble que mes colères ne sont pas si épouvantables.

    J'entre dans des relations de type parent-enfant; lorsque plus tard je me rends compte que je suis dominée, je suis extrêmement choquée, pique une crise à l'autre personne, rompant brutalement la relation.

    Lorsque je sens un jugement sur moi, lorsque je suis en désaccord avec l'opinion de l'autre, alors cela me perturbe tout à fait. Là, c'est certain que je vais m'exprimer de façon très brutale. Si je ne me choque pas tout de suite, je vais dire ce que je pense à d'autres personnes avec une charge émotive énorme, il faut que ça sorte. Il arrive que je réussisse à ne pas exploser depuis les dernières années, c'est toutefois rare. Mais alors je vis une énorme colère intérieure, un conflit intérieur déchirant, et je sors finalement de cette tension insupportable par d'autres événements extérieurs qui arrivent, et me font vivre tout aussi d'intenses émotions. Donc, c'est l'enfer très souvent!
     
     

  • Je suis hypersensible, je pleure très facilement; la moindre petite douceur qu'on me témoigne, et je peux pleurer des heures. Quelquefois je suis si triste en dedans que je pleure, même dans la rue, le métro ou des endroits publics, ou en parlant à quelqu'un. Le moindre reproche me met en colère ou me fait pleurer. En situation de conflit au travail, je fais des colères, mais je peux aussi pleurer 2 jours d'affilée, sans m'arrêter (même si c'est peut- être difficile à croire, c'est pourtant vrai; je ne peux retenir mes larmes, quand ça part, c'est pour longtemps), cela m'est arrivé plus d'une fois.
  • Je ne me suis jamais sentie coupable de mes crises. Je me sens tout simplement très en colère du fait que les personnes ne me comprennent pas, ne soient pas d'accord avec moi, ne voient pas les choses de la même façon que moi. J'ai peur d'être rejetée à cause de mes crises, mais je sais que je referais la même chose si l'événement se reproduisait.

  • Je nie fortement, du moins c'est ce que je faisais jusqu'à aujourd'hui, toute responsabilité devant chacun et tous ces conflits, colères, ruptures, et échecs.
     
     
  • Je ne suis jamais d'humeur égale. J'ai des hauts et des bas. De fond, je suis une personne négative, mais il arrive que je sois de bonne humeur, très dynamique, par exemple lorsque je commence un nouveau projet, un nouvel emploi. Cela peut durer quelque temps. Mais après cela, je sombre dans une humeur dépressive, je trouve cela sans aucun intérêt, vide, je m'ennuie. De plus mon humeur est sujette aux facteurs extérieurs; si je ne me sens pas confortable physiquement, je vais être de très mauvaise humeur, si je ne me sens pas bien dans mes relations, je vais être d'une humeur exécrable. Si cela ne va pas bien dans ma vie, si je me sens rejetée, je vais penser souvent à la mort, parce que je souffre trop.
  • Je change constamment d'idée. Les gens n'aiment pas cela et me le disent. Je dis oui à quelqu'un, je tente un projet, et puis je n'ai plus le goût. Alors on ne peut jamais compter sur moi, planifier avec moi. Je change constamment d'orientation, de buts, de projets. J'ai passé d'une carrière en affaires, à une communauté contemplative, un retour dans le monde des affaires à un retour aux études, puis une entrée dans une communauté religieuse active, pour en sortir encore plus désorientée. Si je le pouvais, je changerais de profession tous les 6 mois. Il me faut un but, mais en cours de route ces buts ne présentent plus pour moi d'intérêt. Et puis, je suis très souvent écartelée à l'intérieur de moi quand j'ai une décision à prendre, je ne sais pas ce que je veux.
  • Je cherche le sens de ma vie, je suis en quête existentielle. La quête existentielle, c'est la constante dans ma vie. À certaines périodes, pour apaiser ma souffrance, je lis des livres de spiritualité. Plus rien d'autre ne m'intéresse. Je dévore littéralement. Mais ça ne me remplit pas.
  • Je suis tout à fait déstructurée seule chez moi. Je ne mange pas, ait énormément de difficultés à me mettre au lit (lorsque je ne travaille pas, cela m'amène à vivre de nuit; lorsque je travaille, c'est extrêmement pénible pour moi de suivre un horaire), fume de façon compulsive, même si je déteste l'odeur de la cigarette et sais que je nuis à ma santé). De plus, je dépense trop, par impulsion, alors après il faut que je me prive. Même si je fais de très bons salaires lorsque je travaille, je suis constamment pauvre et en difficulté de payer mes dettes. À l'extérieur, je ne fume jamais (même lorsque c'était partout permis), je fais extrêmement attention à mon alimentation, je parais bien et suis très organisée au travail, on m'en fait des éloges.

  • Vous sentez-vous " comme tout le monde " ?

    Non. Je vois bien que les gens autour de moi n'ont pas mes difficultés, qu'ils ne vivent pas les montagnes russes que je vis avec mes émotions, qu'ils n'ont pas les problèmes relationnels que je vis au travail, qu'ils ne font pas des crises de larmes ou de colères comme moi.

    Quand avez-vous pris conscience de votre " différence " ?
    J'ai pris conscience, comme à distance, que j'avais ces difficultés de personnalité que les autres n'avaient pas, et ce graduellement, avec les années, après avoir commencé à travailler après mes études.

    Mais j'étais tellement habituée à être comme cela, pour moi c'était normal, ma manière d'être. En fait j'attribuais aux autres la responsabilité de mes colères. J'aurais voulu que les autres changent, je ne voyais pas ce que je pouvais changer chez moi. J'ai toujours adopté une position de victime. Je n'ai jamais pleinement réalisé que mes crises de colère étaient anormales avant d'aller sur votre site, même si on me l'a répété si souvent, et même après tous les échecs relationnels que cela m'a valus.

    Vous sentez-vous malade ? (qui n’est pas en bonne santé)

    Je me sens "malade par en dedans", surtout depuis quelques années.

    En quoi vous reconnaissez-vous dans cette maladie ?
    Je me reconnais à peu près en tout, et plus particulièrement dans l'incapacité de contrôler mes émotions, mon hyper-sensibilité, mon instabilité émotive, le clivage qui fait que je vois les gens tout en noir ou tout en blanc, ma peur du rejet, mon impossibilité d'avoir une cohésion intérieure, mes colères inappropriées que je n'arrive pas à contrôler, ma souffrance intérieure.

    Symptômes

    Avez-vous globalement des problèmes relationnels ?

    Vous sentez-vous esclave de vos émotions ? Est-ce que vous vous reconnaissez dans cette phrase ? " Les borderline ont une tendance biologique à réagir plus intensément que les autres à des niveaux de stress moindres d’une part, et à mettre plus de temps pour se rétablir, d’autre part. Ils ont des " pic " émotionnels plus élevés pour de faibles provocations et prennent plus de temps pour récupérer " Est-ce que vous vous reconnaissez dans cette phrase ? " Les patients sont dans l'incapacité d'avoir des rapports humains "normaux" et donnent l'apparence ce ne pas ressentir l'éventail des émotions humaines. En fait ce serait plutôt qu'ils les ressentent trop. Je peux avoir des rapports humains normaux; c'est à la longue que mes problèmes relationnels éclatent. Pour ce qui est de l'éventail des émotions humaines, je crois au contraire que les gens voient que je vis à des degrés beaucoup plus élevés que la normale toute la gamme des émotions humaines. Je ne suis pas renfermée, je suis très ouverte. J'entre facilement en relation avec les gens, et ce n'est pas superficiel. Mon cœur et ma tête sont là.

    Avez-vous des sautes d’humeur fréquentes, intenses et imprévisibles ?

    Oui. Mon humeur varie selon que je me sens bien ou non avec quelqu'un, et aussi selon que je me sens confortable ou non physiquement. Ces données étant variables, mon humeur change souvent. En fait mon humeur change selon qu'il y a ou non un conflit en moi, que j'aime ou n'aime pas ce qui est là devant moi. Plus le conflit est intense, plus ma saute d'humeur est intense.

    Mais mon humeur fluctue aussi de façon cyclique; je m'emballe pour un but, alors mon humeur est très haute, et puis je deviens "tannée", je me sens vide, alors je suis au plus bas.

    Avez-vous des colères inappropriées ?

    À noter que je ne sors jamais ma colère extérieurement lorsque je suis seule. Ce n'est qu'avec des gens que j'extériorise ma colère.

    Etes-vous du genre seul(e) ou entouré(e) d’ami(e)s, sortant souvent ?
    Je suis seule.

    Souffrez-vous de solitude ? (que vous soyez entouré(e) ou pas)

    Oui. Lorsque je ne suis pas dans un conflit ou une tension intolérable, je m'ennuie, me sens isolée de tous, vide. Donc il n'y a pas de répit à ma souffrance. J'ai quelquefois un besoin avide de relations avec autrui, et quelquefois je préfère ma solitude. Dans mes relations, je recherche l'intimité réelle, je ne veux pas du superficiel. Alors cela élimine bien des groupes de personnes.

    Je crois que c'est ce vide en dedans de moi, qui fait que j'ai certains comportements auto-destructeurs et que périodiquement, je m'investis énormément dans des lectures spirituelles. Par contre, je crois que ma solitude est préférable à la dépendance. Car j'alterne entre dépendance (je fais tout pour ne pas déplaire, cela donne une relation de type parent-enfant) et autosuffisance dans mes relations.

    Avez-vous des moments de dysphorie (sentiment de vide, contraire de l’euphorie) et quand ?

    Est ce que " ça se voit " quand vous n’allez pas fort ?
    Oui, je suis très transparente. Lorsqu'on me voit, on voit mes tripes, c'est-à-dire ce que je vis à l'intérieur. Du moins la plupart du temps.

    Etes-vous capable de maîtriser votre flux émotionnel "quand il le faut" ?


    Avez-vous 2 vies ? Une vie lorsque vous êtes en société, et une autre avec des comportements très différents lorsque vous êtes seul(e) (sans "témoins") ?
    Oui.

    Avez-vous une peur de l’abandon ?

    Oui. Je suis extrêmement sensible au rejet, je vois toute petite marque de rejet des gens, alors que ces mêmes gens n'en sont même pas conscients.

    Si oui, cela va t’il pour vous au point de rester seul(e), meilleur moyen de ne pas être abandonné(e) ?
    Je ne crois pas. Si je suis seule, c'est que je n'arrive pas à trouver où sont les gens intelligents du cœur, qui ont du vécu, qui ne courent pas après des futilités. Je trouve que la plupart des gens n'ont pas de profondeur.

    Est-ce que vous vous reconnaissez dans cette phrase ? " Certains patients Borderline oscillent entre un comportement d'adulte et un comportement d'enfant perturbé, ils ont un mode de pensée noir et blanc. X ou Y est "tout bon" ou "tout mauvais" " ?

    Est-ce que vous vous reconnaissez dans cette phrase ? " L'adulte qui va bien chez le patient Borderline est une façade, un rôle, un leurre. Pour avoir une communication réelle avec le patient, il faut parler à l'enfant qui est en lui " Non. On peut avoir une communication réelle avec moi, en autant que mes mécanismes de défense ne sont pas enclenchés.

    Vous reconnaissez-vous dans les mots " homme enfant " " femme enfant " ?

    Je n'aime pas vraiment ce terme de femme-enfant. Ça ne me décrit pas globalement. Par exemple je suis très développée intellectuellement, et j'ai une maturité d'expériences. Mais une partie de moi est sous-développée.

    Est-ce que vous vous reconnaissez dans cette phrase ? " Les patients souffrent souvent de désorganisation et sont capables de se noyer dans un verre d'eau. Il y a souvent la même "pagaille" dans leur quotidien que dans leur tête "

    Oui, je ne suis pas du tout structurée au niveau du temps. Et quelquefois mon appartement est un "bordel", mais la plupart du temps c'est tenu à la perfection. J'ai en horreur la saleté et les mauvaises odeurs (d'ailleurs pour moi les odeurs c'est un très gros problème, il y a des personnes que je ne peux approcher à cause de leurs odeurs, cela me met dans tous mes états; les gens ne comprennent pas à quel point je ne peux tolérer les mauvaises odeurs, et à quel point c'est vital pour moi l'hygiène).

    En fait, c'est seulement les jours où je ne travaille pas que je suis tout à fait désorganisée. Il me semble que lorsque je suis désorganisée, c'est pour me reposer de toute la pression que me fait vivre la discipline. En fait, je n'aime pas la discipline et je ne parviens pas à me donner une discipline de vie.

    Etes-vous plutôt " solide " ou " fragile " (répondre sur le plan santé et sur le plan psychique)
    Je sens qu'une partie de moi est très solide sur le plan psychique. Je suis certaine que la plupart des gens n'auraient pas été capables de se relever des épreuves que j'ai traversées, d'ailleurs dues en grande partie à mon trouble de personnalité.

    Je sens aussi qu'il y a une partie fragile en moi sur le plan psychique, à cause de mon manque de tolérance, de contrôle pulsionnel, mes passages à l'acte (colères, ruptures) fréquents dans mon mode relationnel, mon alternance entre l'idéalisation et la dévalorisation.

    Sur le plan physique, je me sens solide.

    Vous êtes-vous posé la question – pourquoi suis-je ainsi ?
    J'ai toujours su que c'était en rapport avec mon enfance.

    Si oui d’après-vous quelles sont les causes de votre maladie ?
    Je suis au départ d'une nature très sensible. Cela, ajouté à l'incapacité de ma mère à bien materner, me semble la source de mon problème. Que faisait-elle quand nous pleurions? Quand nous criions? Nous donnait-elle le biberon brusquement, sans amour?

    J'ai vu ce que ma mère faisait avec les bébés plus jeunes. Lorsqu'ils pleuraient, elle les enfermait dans des placards jusqu'à ce qu'ils n'en peuvent plus de pleurer. Aucun lien affectif avec l'enfant, une dureté à faire peur…

    Ma mère est une femme incapable de sentiments, incapable de relation, elle est fermée complètement, elle a plein de manies, elle est extrêmement égoïste, très sensible et souffrante. Tout le monde dit qu'elle est anormale, et personne ne peut l'endurer. Elle est épileptique et a manqué mourir à la naissance de moi et ma sœur jumelle. Quelques semaines dans le coma! Elle n'a jamais accepté sa maladie (l'épilepsie). Mon père est aujourd'hui décédé, mais c'était un homme très violent, détesté, fraudeur, menteur, infidèle, malheureux, immature.

    J'ai été extrêmement malheureuse pendant mon enfance. À 7 ans, j'ai réalisé que ma mère ne m'aimait pas. Mes parents ne nous ont donné aucune marque d'affection. On était comme des objets pour eux, des objets en trop, qui devaient obéir, travailler tout le temps (aider ma mère à la maison et travailler sur la ferme), et ne pas dire un mot, se coucher à 7 heures du soir même adolescents, et être toujours premiers à l'école, sans quoi c'était la fessée. Nous avons tous été battus, mal vêtus, et ne mangeant pas à notre faim, même si mes parents avaient de l'argent. Ma mère se plaignait tout le temps, critiquait sans cesse, nous disputait constamment. J'ai vécu cela comme un enfer insupportable. Je rêvais souvent qu'elle était le diable, même lorsque j'étais jeune adulte. Je suis celle qui a été la plus maltraitée, la plus humiliée aussi, parce que, dès l'âge de 10 ans, je disais ce que je pensais, c'est-à-dire je criais à ma mère qu'elle était folle quand elle nous battait. Plus tard, je faisais des colères énormes.

    Je n'ai pas été capable de bien me construire dans un milieu si dysfonctionnel. Il y a des personnes dans ma famille qui sont plus équilibrées que moi, par exemple ma sœur jumelle. Est-ce seulement dû à sa composition biologique? Ou est-ce qu'un événement particulier traumatisant avec ma mère m'est arrivé? Je ne saurais répondre.

    Y’a t’il un comportement, un mode de pensée, quelque chose qui vous caractérise et qui n’est pas cité dans les questions précédentes et qui selon vous à une importance sur la maladie ?
    Ce qui me caractérise et dont on ne parle peu, c'est que je ne me suis jamais sentie coupable de mes passages à l'acte (colères, ruptures) répétés dans mes relations, et mon déni de toute responsabilité. Ma souffrance, c'est mon vide et mon écartèlement intérieur, mes conflits extrêmes et insupportables à l'intérieur de moi, mais cela n'a jamais été une souffrance d'avoir blessé d'autres personnes. Si j'avais vu l'autre pleurer, j'aurais probablement éprouvé de la douleur, mais cela n'est jamais arrivé suite à mes passages à l'acte, et donc je n'en suis pas sûre.

    De plus dans certaines de mes relations je me place en relation de dépendance, c'est-à-dire que je me perçois comme dominée, je n'ose pas dire non, dire ce que je pense jusqu'au moment où j'explose; cela on n'en parle pas beaucoup non plus.

    Par ailleurs, dans mon cas, il y a une hostilité, une colère sourde à l'intérieur de moi, qui est en veilleuse, mais qui reste là: je déteste ma mère. On ne parle pas de cette colère qui habite le borderline.

    Estime de soi

    Vous sentez-vous plutôt dans la moyenne coté intelligence ? (précisez votre degré d’étude ou de qualification si cela peut " éclairer ")
    Je me sens supérieure. Je trouve que peu de gens sont intelligents, comprennent les choses, et ont une intelligence du cœur. Je suis comptable agréée. J'ai un MBA en Finance. Je suis arrivée première dans toutes mes classes, avec des résultats parfois fort supérieurs à la moyenne. J'ai des études en théologie, en philosophie. On me dit souvent que j'ai une intelligence supérieure à la moyenne. J'ai une vision très large. Je peux discuter d'un tas de sujets avec des personnes très variées. Je ne plafonne jamais, mais ça me rend très malheureuse quand je m'engage dans une conversation et que je sens que l'autre plafonne. Je suis une personne très profonde. Je peux facilement captiver une variété de personnes fort différentes lorsque je parle. Je peux voir ce qui habite quelqu'un. Je peux facilement rejoindre les gens, directement dans leur cœur. J'ai tellement souffert, j'ai tellement été brisée par la vie, que j'ai développé la compassion. Je peux parler aux mendiants, aux "poqués", voir leur beauté. En somme, je suis très fière de mon intelligence de tête et de coeur! Sauf que je n'ai ni intelligence émotionnelle, ni intelligence corporelle.

    Avez-vous confiance en vous ?

    En ce qui a trait aux relations interpersonnelles, non. En ce qui a trait aux tâches techniques, énormément, car je sais que si je n'y réussis pas, peu vont y réussir.

    Est-ce que vous vous aimez ?
    Je n'arrive pas à répondre à cette question. Une journée je dis: "non", l'autre journée je dis: "non en partie et oui en partie", puis une autre journée, je dis: "oui, je m'aime, ce sont certains autres que je déteste". C'est précisément le genre de questions qui me torturent.

    Vous sentez-vous " gentil(le) " ou pas et pourquoi ?
    Je me sens quelquefois une personne très douce, gentille, pleine d'amour. On me le dit aussi. Mais je peux être aussi une personne extrêmement dure. La pression me rend dure.

    Vous êtes vous déjà fait du mal ?

    Oui, seulement 2 fois, par des coupures. J'étais adolescente et je crois que j'ai fait cela comme un appel au secours, mais pas pour me tuer.
    J'ai aussi conscience de me faire du tort en fumant de façon compulsive, en ne mangeant pas, en me couchant à des heures déraisonnables. Je n'ai ni plaisir à manger et à me coucher.

    Si oui, de quelle(s) manière(s) ? (que ce soit physiquement ou psychiquement)
    Physiquement, j'ai déjà répondu. Psychiquement, je me fouette très souvent, surtout pour aller travailler. Pourtant je suis très travaillante et travaille très fort. Je trouve tout simplement le monde du travail, aujourd'hui, spécialement dans les bureaux, épouvantable.

    Si oui, savez-vous pourquoi vous faites du mal ?
    Physiquement, c'est parce que:

    1) je n'ai pas de discipline et trouve très lourd de prendre soin d'un corps physique;
    2) un désir auto-destructeur du à ma perte de sens, d'intérêt, mon vide devant ma vie.

    Si je me fouette psychiquement, c'est pour fonctionner.

    Avez-vous des tendances suicidaires ?

    Je ne crois pas être à risque. J'ai parfois de fortes tentations de suicide, c'est difficile à exprimer ce qu'elles sont. C'est un désir au dedans de moi, mais ma pensée ne s'accorde pas avec ce désir. Je suis certaine que je ne ferai jamais de passage à l'acte quant au suicide, je me suis posée une interdiction totale là-dessus.

    Etes-vous déjà passé à l’acte ?

    Relation avec les autres

    Faites-vous (réellement) confiance aux autres (ou au moins à un noyau ?)

    De prime abord, j'accorde ma confiance aux gens, je suis très naïve, et en général ils me déçoivent.

    Votre entourage a quelle vision, image de vous ? " oh lui / elle, il / elle est …. "
    Les gens pensent que je suis très brillante, authentique, très forte, dynamique, chaleureuse, la plus gentille personne à mes heures, très attachante, avec une personnalité extrêmement riche.

    Mais aussi que je suis bizarre, différente des autres, agressive, impulsive, colérique, pleine de problèmes, instable, la plus dure des personnes quelquefois, dépensière, déséquilibrée, trop sensible, négative, critiqueuse, pessimiste, ne réussissant rien sauf des études, incapable de dire ses insatisfactions, ne se comprenant même pas elle-même, une causeuse de troubles, qui n'apprend pas des leçons qu'elle reçoit. Et j'en passe sûrement…

    Est-il conscient de vos problèmes ?

    Si oui, à quel point ?
    Je ne crois pas que les gens réalisent que mon trouble de personnalité relève d'un problème d'ordre mental. Seul mon ami prêtre me parle depuis 2 ans de consulter et dit que mes changements d'humeur ne sont pas normal, et il me revient souvent avec cette question : "Ne serais-tu pas maniaco-dépressive?"

    D'autres disent que mon problème est fatal, à cause de mon enfance.
    Certains trouvent que je ne suis pas correcte, sans se poser de questions.
    D'autres trouvent que je ne travaille pas assez sur mon caractère, et me blâment.

    Si non, d’après-vous pourquoi, mais aussi pourquoi les tenez-vous en dehors ?
    Dans mon cas, j'ai souvent dit que j'avais des problèmes, mais en accusant les autres, ou tout ce qui n'allait pas. Je déniais toute responsabilité.

    Si ce n'était de mon ami prêtre qui depuis 2 ans me talonne pour consulter, et si ce n'était que je suis devenue tellement en rage qu'il soupçonne que je sois maniaco-dépressive, que je me suis finalement décidée de faire une recherche sur Internet sur la maniaco-dépression pour lui prouver que je ne souffrais pas de cette maladie, et si ce n'était que ces recherches m'ont conduite à votre site par hasard, jamais je n'aurais réalisé que c'était moi le problème, même si on me l'a souvent dit auparavant.

    Si non, ne serais-ce pas un secret de polichinelle ? Vous leur cachez que vous avez un problème et eux cachent qu’ils le savent ?
    Je me rends compte en effet du ridicule de la situation de mon déni…

    Leur mentez-vous sur votre état ? Etes-vous un(e) menteur(se) ?
    Je n'aurais pas pu dire la vérité, puisque je ne la voyais pas.

    Si oui, pourquoi mentez-vous ?

    Peut-on vous qualifier de manipulateur(-trice) ? (par exemple le fait de faire croire que vous n’avez pas de problème)
    Je n'aurais pas pu dire la vérité, puisque je ne la voyais pas.

    Avez-vous utilisé ou utilisez-vous la campagne de dénigrement ? (il est fou de dire que je suis malade) ?
    J'utilise la campagne de dénigrement chaque fois que je me chicane avec quelqu'un, et elle est spécialement forte lorsque je vis un conflit au travail.

    Si oui, pourquoi ?
    Parce que je crois avoir raison et que je vois les "bibittes" des autres.

    J'essaie de montrer aux autres que la personne que je vois si noire l'est vraiment et donc que ma colère et mes attitudes sont justifiées.

    Si non, est-ce uniquement parce que personne autour de vous n’a " vu " ?
    Je ne comprends pas cette question.

    Comment sont vos proches avec vous ?

    Ils me conseillent sans cesse, m'avertissent de faire attention à mes comportements, me conseillent de penser positif, et se méfient de moi, car ils portent des blessures que je leur ai infligées, et ne savent pas à quelles scènes s'attendre de moi.

    Voudriez-vous que cela change ?
    Oui.

    Comment etait votre enfance (toute petite enfance - adolescence) (évènements marquants, rapports avec vos parents) ?
    J'ai déjà parlé de mon enfance. Des parents très froids, extrêmement exigeants, aucun jeu, on travaillait sans cesse, souvent on devait rester des heures sur une chaise sans dire un mot pour ne pas déranger ma mère. Nous avons été battus, n'avons pas mangé à notre faim. Ma mère nous traitait comme des esclaves, elle critiquait et se plaignait sans cesse, elle nous frappait, et mon père nous battait quelquefois simplement pour que ma mère cesse de se plaindre que ce n'était pas drôle d'avoir des enfants. Et se faire battre, cela impliquait de se faire baisser la culotte, même si nous avions 17 ans, et se faire frapper assez fort pour avoir les fesses bleues et de la difficulté à s'asseoir par après. Mon père a déjà tenté de me fracasser la tête contre un trottoir, criant à tue-tête qu'il allait me tuer. Je ne sais pas s'il l'aurait fait, en tout cas j'ai pu me dégager.

    J'ai vécu mon enfance comme étant un enfer. J'ai voulu tuer ma mère mais j'ai raté mon coup. J'ai voulu mettre le feu à la maison mais n'ai jamais mis mon projet à exécution, de peur qu'on s'aperçoive que c'était moi l'auteur de ce feu. J'ai fait une fugue, je suis restée en famille d'accueil. J'ai dû revenir chez mes parents. Mais tout cela est trop long, je pourrais écrire un livre sur mon enfance…

    J'ai vécu mon enfance et ma jeunesse dans un milieu extrêmement violent, physiquement et mentalement. La violence est devenue normale pour moi.

    Aujourd'hui ma mère dénie tout ce qui est arrivé. Selon elle, nous avons été tous très bien élevés.
     

    Libre arbitre

    Vous sentez-vous libre de prendre en main votre destin ?

    Si non ou pas vraiment, cela vient-il de vous ou d’entraves que vous subissez ou avez subis ?

    Vous sentez-vous responsable de votre devenir ?
    Oui.

    Apprendre que votre état est le résultat d’une maladie et non de votre nature est-il une aide ?
    C'est un grand soulagement, une réconciliation débutée avec moi-même et avec bien d'autres, mais aussi cela avive mon sentiment de colère contre ma mère.

    Traitement

    Avez-vous consulté un ou des médecins pour vos problèmes ?

    Avez-vous été diagnostiqué(e) et quel(s) diagnostic(s) ? Etes-vous traité(e) chimiquement pour ce(s) diagnostic(s) ?

    Si oui, par quel(s) catégorie(s) de médicament(s) ?

    Quel bilan feriez-vous de cette médication ?
     
     

    Voyez-vous un thérapeute ? Si oui, pour quel type de thérapie et depuis combien de temps Si vous êtes en thérapie, votre thérapie vous fait-elle du bien ? Si vous êtes en thérapie, pensez-vous poursuivre la thérapie ? Si vous comptez arrêter votre thérapie, allez-vous essayer " autre chose " ?

    Espoir

    Où vous situez-vous aujourd’hui dans ce tunnel qui mène vers la guérison ?
    J'ai fait 2 pas. Le premier, prendre conscience de mon problème. Le second: décider de régler mon problème.
     

    Y’a t’il une lumière ?
    Oui.

    Etes vous heureux(se) ?

    Non. Je suis contente d'avoir fait la vérité, mais je sais que la traversée vers l'autre rive va être houleuse et difficile, et je ne suis pas sûre d'y arriver.

    Etes-vous " bras baissé " ou " combattant(e) " face à votre situation ?
    Combattante.

    Si " bras baissé ", connaissez-vous le déclic qu’il vous manque ?
     

    Après avoir rempli ce questionnaire

    Etes-vous (selon vous) Borderline ? (que vous soyez diagnostiqué(e) ou pas)

    1. Oui, J’en suis intimement convaincu(e)
    2. Oui, Ca y ressemble bien
    3. Peut-être, mais j’ai encore beaucoup de doutes
    4. Non car je suis guéri(e)
    5. Non, et je ne l’ai jamais été
    6. Je ne sais pas, pas la moindre idée
    Si vous n’avez pas répondu de la même façon à cette question qu’au début du questionnaire, pouvez-vous essayer de l’expliquer ?

    réponses de jan 2003

    76 questions

    retour page interviews de malades